Bien que le jeu de mots entre
le Roi Lear et le verbe lire semble
évident, la puissance de l’œuvre de Shakespeare fait que bien souvent les
courriers à la librairie arrivent avec l’orthographe de la pièce du célèbre
dramaturge anglais. « Ici ce qui compte c’est le goût des autres »,
voilà ce que nous déclare Gilles Bérat quand nous l’interrogeons sur son métier
de libraire. Pour lui les fiches de lectures sur les livres n’ont pas vraiment de
sens puisqu’il faut comprendre avant tout qui on a en face de soi pour délivrer
le conseil de lecture le plus personnalisé possible. Cet ancien financier devenu
libraire a effectué « une reconversion heureuse » selon ses termes en
reprenant en 2002 à Sceaux en Ile de France cette enseigne créée il y a trente
ans. Rencontre avec un libraire qui met autant de cœur que de chaleur a faire
son métier.
Quel roman nous recommandez-vous de lire ?
« La fonte des
glaces » de Joël Baqué (P.O.L).
Pour nous c’est un Boris Vian contemporain avec à la fois une imagination
galopante, beaucoup d’humour. Et puis ce roman vous emporte loin
en Antarctique et dans le grand Nord.
Et du côté des auteurs étrangers que nous conseillez-vous ?
Sans hésiter le dernier roman
de l’immense écrivain israélien hélas disparu en janvier dernier Aharon
Appelfeld « Des jours d’une stupéfiante clarté » (Éditions de l’Olivier). On avait aimé son précédent roman « Les
partisans » et celui-là on l’aime
encore plus.
Y –a-t-il un premier roman qui vous a particulièrement
marqué ?
Pour nous cela n’a aucune
importance que cela soit un premier roman ou pas. Nous ne faisons pas ce type
de classification.
Quel est le livre le plus emblématique de la librairie
que vous recommandez avec ferveur ?
Toute l’œuvre de Ludmila
Ouliskaïa mais pour n’en citer qu’un « Le chapiteau vert » (Gallimard
du monde entier). C’est une vaste fresque autour de trois amis au cœur de la
tragédie soviétique après la mort de
Staline. Mais aussi
« Americanah » de Chimamanda Ngozi Adichie (Gallimard du monde
entier) un roman sur l’immigration, comment rester soi-même quand on change de
continent. Un livre que l’on conseille et que les gens rachètent pour l’offrir.
Vous êtes très attaché aux Sciences Humaines, que souhaitez-vous nous faire découvrir dans
ce domaine ? « Parcours
I (1971—1989) Sociologie et théorie du
langage. Pensée postmétaphysique »
et « Parcours II (1990-2017. Théorie de la rationalité. Théorie du
langage » de Jürgen Habermas
(Gallimard, NRF Essais). Cette publication en deux volumes du géant de
la pensée mondiale est un événement. Ce philosophe allemand qui a beaucoup
écrit sur l’Europe y apporte une réflexion essentielle sur la société
contemporaine.
Quel est le livre que vous vous êtes promis de
lire ?
Il y en a tellement. Tous les
étés j’essaie de plonger dans les classiques et j’aimerais tant pouvoir lire toute
« La Comédie humaine » de Balzac.
Une brève de librairie :
Je suis toujours très ému
quand après avoir conseillé un livre, les gens reviennent pour me dire
simplement à quel point ils l’ont aimé. Qu’ils se donnent cette peine me
bouleverse et c’est alors que je ressens profondément que j’ai rempli ma
mission de « passeur ».
Le Roi Lire
4 rue Florian
92330 Sceaux
01 43 50 20 60
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire